Des conseils pour choisir et mieux utiliser votre appareil photo par Jean-Christophe Dichant

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Comment gérer la perspective en photographie ?

Votre appareil n’est pas très ami avec les notions de perspective en photographie. Le problème se concrétise le plus souvent par des bâtiments déformés, mais aussi plus sournoisement par des portraits à gros nez et petites oreilles.

Même si ces transformations peuvent être voulues par le photographe, il doit savoir les anticiper. Voici comment procéder.

Comment gérer la perspective en photographie ?

Jacques Croizer, collaborateur régulier de Nikon Passion, vous propose cette réflexion sur les dessous de la prise de vue. Pour aller plus loin, découvrez ses deux guides photo.

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La perspective en photographie : mise à plat

Comment gérer la perspective en photographie ?

Exemple de perspective en photographie
La Défense – f/6.3 à 1/500 s – Photo (C) Jacques Croizer

L’être humain possède deux yeux. Ils enregistrent chacun une image légèrement décalée qu’ils envoient en temps réel au cerveau. Ce déphasage lui permet d’évaluer les distances et de percevoir la profondeur de la scène. Il est alors capable de nous en restituer une image en trois dimensions.

A quelques exceptions près, mais qui sont à ce jour plus de l’ordre de la curiosité, nos appareils photos ne sont pas encore dotés de la vision stéréoscopique. Nous cadrons une scène en trois dimensions, ils la restituent sur une surface plane, capteur dans un premier temps, puis écran ou papier. C’est le problème de la perspective en photographie.

Le cerveau se remet au travail pour nous donner l’illusion que la photographie que nous regardons est elle-même en relief. Vous pressentez bien qu’à force d’approximations, ces deux perceptions vont avoir quelques difficultés à converger … Et vous avez raison !

Je ne crois que ce que je vois ?

Observez attentivement la figure ci-dessous. L’écran est plat, c’est notre seule certitude. Pourquoi le cercle noir donne-t-il alors l’impression d’être en arrière des deux cylindres ? Eloignez-vous à un mètre, puis revenez très près de l’écran, en fixant le point noir. Ne le voyez-vous pas qui s’avance peu à peu ?

Comment gérer la perspective en photographie ?

La perspective nous joue des tours

Même si elle n’est pas aussi évidente lorsque vous observez une photo, cette illusion d’optique est tout aussi opérante. Pour qu’une image restitue aussi fidèlement que possible la réalité, il faudrait la regarder sous un angle identique à l’angle de champ de l’objectif avec lequel elle a été prise : de loin si vous avez utilisé un téléobjectif, de près si elle a été faite avec un grand angle.

Les spécialistes parlent de distance orthoscopique, une notion qui n’a bien évidemment rien à voir avec la distance de confort à laquelle nous regardons habituellement un document.  Nous partons vraiment sur de très mauvaises bases pour parler de perspective, une fois l’image aplatie sur un écran ou sur une feuille de papier … Observons tout cela plus concrètement.

Ça penche !

L’enclos paroissial de Pleyben est un haut lieu du tourisme armoricain, dans tous les sens du terme : le plus grand des deux clochers culmine à plus de quarante-sept mètres. Un immeuble de quinze étages en plein cœur du village. Approchons nous.

Comment gérer la perspective en photographie ?

Perspective en photographie – Clocher de Pleyben
f/7.1 à 1/200 s – 24 mm – Photo (C) Jacques Croizer

Le plus petit des deux clochers semble être pris d’une attirance irrésistible pour son grand frère. Et que dire de la maison de gauche, dont la façade et la toiture sont encore plus déformées ? L’explication est à rechercher dans la hauteur du clocher. Pour prendre la photo de l’ensemble, il a fallu fortement lever le nez de l’appareil.

Nous sommes typiquement face à un problème de perspective en photographie : le photographe a prêté attention à la verticalité du clocher principal, mais il en a subi les conséquences sur les éléments architecturaux placés en bordure du cadre. A cette distance, il n’était pas possible de faire mieux, si ce n’est en utilisant un de ces coûteux objectifs à bascule qui corrigent automatiquement la perspective (par exemple le Nikon PC-E 19mm).

Point de vue

On appelle point de vue l’endroit où se place le photographe pour cadrer un sujet. Le point de vue a un impact fondamental sur la géométrie finale de l’image. Pour ne pas déformer les volumes, il faut autant que possible occuper une position centrale, tant en largeur (au centre de la scène) qu’en hauteur (ni plongée, ni contre plongée).

Comment gérer la perspective en photographie ?

Le point de vue idéal

Pour bien gérer la perspective en photographie face à un immeuble, il suffit de se déplacer pour se centrer horizontalement. Il est très souvent bien plus difficile de le faire verticalement, à moins d’utiliser la grande échelle des pompiers ou un hélicoptère … Si vous n’en avez pas les moyens, quelle en sera la conséquence ? La partie la plus haute du bâtiment, qui est aussi la plus éloignée de l’appareil photo, apparaîtra moins large que sa base. Comment y remédier ?

Sur le schéma ci-dessous, les traits pleins relient la base du bâtiment à l’appareil photo. Les traits pointillés font de même avec son sommet. Comparez leurs longueurs : dans la position idéale, centrée verticalement, elles sont identiques.

Au pied du bâtiment, le pointillé rouge est deux fois plus long que le trait plein de la même couleur. Lorsque le photographe se recule, les deux lignes (en bleu) tendent à retrouver des dimensions comparables. C’est le bon compromis pour limiter les déformations : à défaut de pouvoir prendre de la hauteur, éloignez-vous, quitte à utiliser une focale plus longue si vous souhaitez conserver le cadrage initial.

Comment gérer la perspective en photographie ?

Eloignez-vous pour limiter les déformations

Lorsqu’il cherche le bon point de vue, le photographe doit donc tout autant se déplacer, qu’il utilise un zoom ou une focale fixe.

Parfaitement conscient de prendre le risque de déclencher un tollé général dans la zone commentaires en bas de cette page, concluons ce paragraphe en ajoutant que le zoom aurait même un léger avantage sur la focale fixe, si on en reste aux questions de cadrage et de perspective… Mais on ne peut pas être bon partout !

Perspective, focale et capteur

Certains concluront un peu hâtivement de la fin du précédent paragraphe qu’un téléobjectif déforme moins la perspective qu’un grand angle. Il n’en est rien. Prenez la photo avec un grand angle en vous éloignant du bâtiment : le champ embrassé sera bien évidemment plus large, mais si vous coupez l’image pour restituer le cadrage obtenu avec le téléobjectif, vous constaterez que les déformations sont les mêmes.

Plein format ou APS-C, la taille du capteur ne modifie pas non plus la géométrie de l’image. Un capteur plus petit ne fait que la recadrer, donnant l’illusion de la grossir. Pour obtenir le même cadrage avec un grand capteur, il faut se rapprocher du sujet. C’est donc encore une fois la distance à laquelle il se trouve qui intervient, et non la taille du capteur.

C’est une règle fondamentale de l’optique : la perspective dépend uniquement du point de vue.

En voici la preuve.

Démonstration

Nous sommes toujours à Pleyben, mais cette fois ci à l’extérieur de l’enclos. L’objectif utilisé reste le 24 mm. Le cadrage est donc bien évidemment plus large.

Comment gérer la perspective en photographie ?

Perspective en photographie – L’enclos paroissial de Pleyben
f/8 à 1/250 s – 24 mm – Photo (C) Jacques Croizer

La verticalité est faite sur la médiane de l’image, au niveau du porche. La déformation liée à la  perspective subsiste, mais elle est nettement minimisée. Elle sera donc plus facile à corriger… car c’est la bonne nouvelle : il est toujours possible d’aller plus loin avec son logiciel de post traitement !

Le petit plus du post-traitement

Les logiciels permettent pour la plupart de corriger les déformations liées à la perspective. Le principe est simple. Des poignées sont ancrées aux quatre coins de l’image.

En tirant sur les angles, l’opérateur ramène la forme initialement trapézoïdale à un rectangle plus ou moins parfait, mais qui rendra plus confortable la lecture de l’image. Bien entendu, cette manipulation suppose que la partie de la photo qui dépasse soit ultérieurement coupée. La prise de vue doit donc anticiper cette perte : il ne faut pas hésiter à cadrer large !

Comment gérer la perspective en photographie ?

Correction de la perspective – Photo (C) Jacques Croizer

Ne comptez toutefois pas trop sur cet artifice : une retouche marquée laisse toujours des traces. Dans le cas d’une photo prise au niveau de la rue, la correction trapézoïdale provoquera un élargissement des épaules et de la tête des personnages qui se promènent au premier plan. Ils prendront tous l’apparence de Hobbits haltérophiles.

Conclusion

Nous l’avions dit en introduction, la perspective sera toujours plus ou moins une histoire de compromis. S’il subsiste un inconfort dans la lecture de l’image, il doit être justifié par le sujet.

Vous avez des exemples à montrer ?  Postez-les sur le groupe Nikon Passion avec le tag #NPperspective !

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About the Author

Jacques Croizer
Ce tutoriel photo vous est proposé par Jacques Croizer. Collaborateur régulier de Nikon Passion il est aussi l’auteur d’un guide qui simplifie la technique photo au profit du plaisir de photographier. Recevez votre KIT DE DÉMARRAGE PHOTO et UN CONSEIL QUOTIDIEN par mail pour progresser en 5 minutes par jour.

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19 Commentaires sur "Comment gérer la perspective en photographie ?"

  1. Bonjour,
    Voici ma technique, version rapide à main levée (à la fois pour des bâtiments et des intérieurs, comme des musées ou lieux d’expo):
    Je photographie le plus précisément possible à l’horizontale, en visant un point à la hauteur de mon regard (si le sol est plat).
    Pour un bâtiment, avec mon 24-70, je me retrouve souvent en mode vertical pour tout voir. Je vois les lignes verticales se redresser, et je peux composer avec ça.
    Le résultat : une image avec un sol trop présent, que je recadre sur le bâtiment dans LightRoom, ce qui est à anticiper à la prise de vue, mais on s’y fait.
    Inconvénient, relatif selon le matériel: on perd beaucoup de pixels utiles dans l’opération.

    C’est une technique très satisfaisante pour moi, puisqu’on voit déjà son résultat dans le viseur, on se prend pour un photographe d’archi avec son objectif à décentrement. Parfois de légers ajustements sont nécessaires avec LightRoom, mais le gros du boulot est fait.
    Regarder des images dont les verticales sont rigoureusement parallèles est très apaisant, ce sont des images tout de suites plus propres. Il y a un « effet pro » qu’on n’identifie pas tout de suite, mais qui est réel.

  2. JEAN CLAUDE doublet | 2 janvier 2024 à 9 h 42 min | Répondre

    TRES INTERESSANT CE SUJET SUR LES GRAND ANGLS J’AI APPRIS MERCI
    BONNE ANNEE

  3. Liane Larivière | 20 juin 2021 à 12 h 41 min | Répondre

    Merci beaucoup pour les renseignements, je vais porter plus attention à la perspective à l’avenir.

  4. Merci d’aborder ce sujet.
    J’aimerais ajouter qu’un objectif à décentrement n’est pas utile qu’en photo d’architecture mais aussi pour montrer un paysage en forte pente d’une façon naturelle.
    Un de mes sujet favoris est le Vignoble de Lavaux (Suisse). Sans le décentrement les images prises en plongée depuis le haut du vignoble sont souvent trop artificielles : les éléments que nous savons verticaux : les murs, barrières, piquets métalliques, forment des lignes convergentes. Une correction de perspective logicielle oblige à un recadrage trop important.

    J’utilise très souvent le niveau de mon boîtier : en programmant la touche de fonction, on passe facilement de la sélection du collimateur AF au niveau. Le boîtier est bien plus fiable que les gadgets à bulles, et vous permet un cadrage droit à mains levées dans deux dimensions.

  5. Bonjour. Merci pour cet article ! Toujours une mine d’informations… Bonne journée

  6. Excellent travail continuez

  7. Bonjour Jean- Christophe !
    Excellent article, car Dieu sait que l’on se pose (en tout cas, moi) sacrément souvent le problème ! faut- il corriger, non, si, hésitation, puis finalement pas ! pfff pas facile. quelques fois, c’est très évident car la correction à faire n’est pas monstrueuse, et quelques fois , on perd trop de substance et il vaut mieux laisser non?

  8. Merci Jean-Christophe tes articles sont toujours aussi intéressant a lire

  9. Encore un bon tuto sur la perspective. Ceci est bien amené et expliqué. Bon partage Marc.

  10. Bonjour, Le format carré du moyen format oblige à moins relevé le nez de l’appareil, c’est normal nous pouvons avoir plus d’espace à droite et à gauche du sujet. C’est ce que j’ai constaté. Amicalement. J.C.

  11. Merci pour ces explications : j’ai déjà utilisé le fait de « tirer sur les angles » pour corriger partiellement les photos d’une galerie de peinture ; ça se fait facilement sous Photoshop CS6. Mais c’est loin d’être parfait, surtout quand les tableaux sont exposés dans un couloir et que l’on doit prendre la photo à moins d’un mètre.

  12. Je suis surpris par la restriction sur la correction du post traitement concernant l’élargissement de la tête et des épaules des personnages du premier plan.
    Ils ont certainement été victime de l’effet de perspective alors pourquoi le traitement serait il trop fort pour eux? Est ce que la notion de distance serait un facteur opérant dans l’effet perspective et différent dans la correction post traitement Sujet effleuré dans une réponse Jacques Croizer | 21 août 2017 à 21 h 58 min

    • Effectivement, le post traitement ne peut pas prendre en compte la distance entre les plans. La correction est d’autant plus visible sur les personnes au devant de la scène qu’on sait à peu près quoi attendre de leur morphologie. Si c’est une cabane, il sera plus facile d’admettre un éventuel tassement.

  13. Très clair comme toujours. Merci

  14. Bonjour Monsieur Croizer,

    J’ai lu plusieurs de vos articles, acheté votre livre Tous photographes. Il est pour les débutant mais il faut un peu de bagage pour vite le comprendre.

    Dans tout ce que vous écrivez, on y voit la profondeur de vos connaissances. Il faut parfois relire deux ou trois fois certains passages, pas parce que c’est incompréhensible mais simplement pour aller plus loin dans la compréhension.

    Merci beaucoup

    • Un retour bien sympathique 🙂 Les 58 leçons de mon premier livre sont conçues pour qu’un débutant puisse rapidement tirer le meilleur parti de son appareil, puis revenir sur certains thèmes pour les approfondir.

  15. Super info, oui souvent lorsque je photographie un ensemble cathédrale et annexe j’avais cet effet, maintenant je pourrai améliorer ma prise de photos, encore merci pour l’info , la photo dépend uniquement du point de l’angle de prise , entièrement d’accord avec vous

  16. Oui, mais …
    il me semble, d’expérience, qu’une correction de perspective « idéale »/ »systématique » donne souvent un résultant déroutant, voire dérange ou trouble le « lecteur ».
    Notre cerveau ne serait-il pas habitué à cette déformation dépendante du point de vue ?
    Ou mauvaise correction de la perspective ?

    • Merci pour ce retour. Une correction de perspective via un logiciel ne prend pas en compte la distance qui sépare les différents plans. Elle est donc imparfaite, d’où un sentiment bizarre quand on regarde la photo corrigée. C’est d’autant plus un pis aller que la correction est importante/