Des conseils pour choisir et mieux utiliser votre appareil photo par Jean-Christophe Dichant

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Comment faire un bokeh : définition, principe et exemples

Le bokeh désigne l’effet de flou d’arrière-plan souvent utilisé pour mettre en valeur un sujet. Le bokeh n’a rien à voir avec le flou de bougé ou le flou de mise au point. Il participe à la dimension artistique de l’image et à ce titre, mérite autant votre attention que ce qui se passe dans la zone de netteté.

Comment faire un bokeh : principe et exemples

Ce tutoriel vous est proposé par Jacques Croizer qui a écrit pour Nikon Passion plusieurs tutoriels sur les dessous de la prise de vue. Pour aller plus loin, découvrez également ses deux guides photo.

Voir les livres « Tous photographes ! » …

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Anémone Alpine – f/4 à 1/800 s – 100 mm + bague – photo (C) Jacques Croizer

Le Bokeh : concept de profondeur de champ

Le concept de profondeur de champ a été largement détaillé dans un précédent tutoriel. On en retiendra qu’une image peut être décomposée en trois zones : un espace net entouré de deux volumes flous.

Le premier contient généralement le sujet, les deux autres contribuant à ce qu’il est convenu d’appeler l’espace négatif.

Toutes les photos ne présentent pas ces trois dimensions : l’avant plan flou ne se matérialise en effet que lorsqu’un élément s’intercale entre le sujet et le photographe. L’arrière-plan flou est quant à lui absorbé par l’horizon, dès lors que la distance de mise au point atteint l’hyperfocale.

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

La profondeur de champ théorique est calculée par des formules mathématiques strictes : en traversant la frontière, on passe directement du net au flou. La réalité n’est pas aussi brutale. Le flou s’installe plus ou moins rapidement dans l’image. On parle alors de profondeur de champ ressentie. La dimension esthétique ainsi introduite est éminemment subjective, donc discutable. Nous allons nous y employer.

Le flou

Utilisons une image pour bien appréhender ce qu’est le flou. Au soleil, il est possible d’allumer un feu de brindilles avec une loupe. Lorsqu’elle est à la bonne distance du sol, les rayons se concentrent en un même point qui devient vite incandescent. Si la loupe est plus haute ou plus basse, la chaleur est diffusée sur un cercle trop large pour provoquer l’embrasement des brindilles.

Vous avez tous un jour ou l’autre joué à Robinson Crusoé, vous allez donc facilement comprendre ce qui suit. Lorsque vous faites la mise au point, c’est un peu comme si vous bougiez la loupe.

Tous les points situés à la bonne distance sont représentés par un point net sur le capteur. Ceux qui sont trop près ou trop loin se transforment en une tache floue.

Une formule mathématique permet de calculer le diamètre théorique de la tache floue : elle s’étale d’autant plus que le point qu’elle représente est loin du plan de netteté. Nous parlons bien là d’un modèle très imparfait puisque la diffraction (fonction de la couleur de la tache), mais aussi le contraste, les aberrations, etc… sont autant de raisons pour que la réalité nous réserve quelques surprises.

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Formation du flou

On remarque sur le schéma ci-dessous que si les deux points intermédiaires n’existaient pas, la transition net/flou serait plus rapide. De l’intérêt, lorsque vous photographier une personne, de l’éloigner du mur pour noyer les détails du crépi dans le flou !

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Vitesse de propagation du flou (dynamique de défocalisation)

La formule de calcul montre également que la tache floue croit d’autant plus vite que le diaphragme est ouvert, que la focale est longue… Nous en reparlerons dans la suite de l’article.

Les dimensions de la tache ne suffisent pas à expliquer la qualité du flou. Il faut aussi prendre en compte sa forme, le gradient de lumière à sa périphérie, tous ces éléments imperceptibles qui font qu’à focale et diaphragme identiques, deux objectifs de marque différente n’ont jamais le même rendu.

Le bokeh

Il fallait pouvoir distinguer le flou volontaire dans lequel se fondent harmonieusement des taches de couleur du flou de bougé ou du flou de mise au point, qui sont le plus souvent autant de défauts rédhibitoires.

C’est ainsi qu’est apparu le terme bokeh. Une fois n’est pas coutume, le mot n’est pas anglais mais dérivé du japonais boke qui signifie flou.

Le bokeh ne regroupe pas seulement les flous d’arrière et avant plan. Il exprime également leur apparence. On parlera par exemple d’un bokeh doux, moelleux, crémeux en opposition à un bokeh rugueux ou nerveux. Analysons les paramètres qui influent sur cet aspect.

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Forme du diaphragme et qualité du flou

La forme de la tache a un rôle important (mais pas forcément primordial) dans le rendu de la zone floue. Elle dépend du nombre et de la courbure des lamelles qui constituent le diaphragme.

Avec six lamelles, elle sera hexagonale. L’objectif AF-S NIKKOR 50 mm f/1.8 G en a sept et son grand frère AF-S NIKKOR 50 mm f/1.4 G deux de plus.

Le légendaire Trioplan 100 mm f/2,8 récemment réédité par Meyer-Optik propose quant à lui un diaphragme composé de quinze lamelles : la tache est pratiquement circulaire… mais ça nous met quand même la lamelle à 100 euros pièce. Cher bokeh !

A pleine ouverture, les lamelles disparaissent. Sur tous les objectifs, l’ouverture est alors circulaire. On pourrait penser que dans ces conditions, tous les bokeh se valent. Il n’en est rien. C’est en réalité toute la conception de l’objectif qui entre en ligne de compte, sa formule optique, la qualité de ses verres, du traitement de surface…

Les défauts de certains objectifs apparaissent parfois comme une signature dans leur bokeh. Après ce qui vient d’être dit, auriez-vous imaginé que le diaphragme utilisé pour la photo ci-dessous ne compte que six lamelles ?

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Fantôme – f/2.8 à 1/250 s – 50 mm + bague – photo (C) Jacques Croizer

Bokeh et focale

Votre envie aujourd’hui est sans doute plus d’optimiser l’utilisation de votre objectif pour obtenir de jolis flous que d’en acheter un nouveau, afin de voir si son bokeh sera différent de celui que vous possédez déjà. Voyons comment faire en commençant par la focale.

Nous l’avons déjà dit, plus la focale est longue et plus il est facile de faire des taches harmonieuses. Apparait alors un paradoxe qu’il faut absolument toujours avoir en tête :

il faut s’éloigner du sujet pour mieux le photographier de près !

Explications : supposons que vous ayez un zoom 18-105 mm. A 18 mm, position grand angle, vous serez très proche du sujet et vous aurez l’impression d’avoir optimisé votre emplacement pour en faire un gros plan. En réalité, le passage du net au flou (dynamique de défocalisation) sera très lent, rendant la texture du fond trop présente.

Si vous utilisez la position 105 mm, vous devrez vous reculer pour obtenir le même cadrage. Votre profondeur de champ à diaphragme identique sera inchangée, mais la transition vers la zone floue sera beaucoup plus douce. Sans modifier la netteté du sujet, vous aurez amélioré le rendu de l’espace négatif.

Bokeh et ouverture

La forme de la tache floue reflète celle du diaphragme. Plus il est fermé et plus elle est petite. Elle se fond alors d’autant plus difficilement avec sa voisine que ses contours sont également plus nets. Joli bokeh rime souvent avec diaphragme ouvert.

Les amateurs de macro ou proxi photographie font parfois l’erreur de trop fermer le diaphragme pour gagner de la profondeur de champ. En passant de f/4 à f/16 sur un objectif Nikon 105mm, elle n’augmente que de 3 mm au grandissement 1:1. Ce gain marginal se paye par une importante dégradation du bokeh. Sachez trouver le bon compromis en fonction de la distance à laquelle se trouve l’arrière-plan !

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Orchis Sureau – f/4 à 1/250 s – 150 mm + bague – photo (C) Jacques Croizer

Apparait ici un cruel dilemme pour les zooms à ouverture variable, comme par exemple le standard AF-S DX Nikon 18-105mm f/3.5-5.6G. Le diaphragme en position grand angle est plus ouvert (f/3.5) qu’en position téléobjectif (f/5.6). Pas facile de trouver dans ce cas le bon arrangement entre la focale la plus longue possible et la plus grande ouverture.

Seuls des essais vous permettront de bien connaitre et maîtriser votre matériel.

Relation avec la distance de mise au point

On parle beaucoup plus de bokeh en macro ou pour du portrait que pour de la photo d’architecture. La raison en est simple : la tache floue s’étale d’autant plus que la distance de mise au point est petite.

A focale identique, il est donc plus facile d’obtenir un bokeh moelleux en s’approchant de son sujet. Gardez toutefois à l’esprit qu’il faut avant tout utiliser la focale la plus longue possible pour un cadrage donné. Encore des essais en prévisions, car il n’existe pas de recette type couvrant toutes les situations. Plus le sujet est gros (une rose en comparaison d’une violette) et plus il est préférable d’utiliser une longue focale.

Bokeh et arrière-plan

La tache floue s’étend lorsque son point source s’éloigne du plan de mise au point. Il faut donc autant que possible décoller le sujet de son environnement pour que ce dernier soit le plus fondu possible. Lorsque la distance entre le sujet et l’arrière-plan est très supérieure à la distance de mise au point, il est même possible de rendre le fond uniforme, comme sur la photo ci-dessous. Il faut bien évidemment que les taches aient la même luminosité et la même couleur.

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Soldanelles – f/4 à 1/250 s – 150 mm + bague – photo (C) Jacques Croizer

Imaginons que vous fassiez un portrait avec une focale de 90 mm et une mise au point à 2 mètres. La diffusion de la tache floue sera la même avec un diaphragme à f/2 et un fond à 2,50 mètres qu’avec un diaphragme à f/4 et un fond à 3,30 mètres. Deux crans de gagné pour avoir avancé le sujet de 80 cm…

Mais au-delà des chiffres, c’est dans le viseur ou sur l’écran arrière de l’appareil que tout se joue !

Bokeh et capteur

Savez-vous pourquoi il est si difficile d’obtenir un arrière-plan flou avec un téléphone ou un compact standard ? C’est tout simplement parce que plus le capteur est petit et moins le bokeh est doux, toutes choses égales par ailleurs.

Ce n’est pas une raison pour jeter votre APS-C aux orties et acheter dans la foulée un plein format car c’est là encore une histoire de compromis : plus le capteur est petit et plus la profondeur de champ est importante à cadrage et diaphragme identiques. Et c’est parfois un avantage !

Relation avec la lumière

Si votre fond est constitué d’un grand mur blanc, il est évident que vous n’en ferez jamais un joli bokeh. La source doit présenter un contraste des teintes ou des luminosités pour que les taches se fondent entre elles sans pour autant devenir invisibles.

Comment faire un bokeh, effet de flou d'arrière-plan

Sabot de Venus – f/4 à 1/160 s – photo (C) Jacques Croizer

La lumière du soleil filtrée en fin de journée par les branchages est une bonne occasion d’aller chercher un joli bokeh. Lorsque le soleil est proche de l’horizon, sa lumière dorée réchauffe les couleurs. Les photographes urbains utiliseront quant à eux les phares des voitures, les enseignes lumineuses, …

Fiche recette pour un bokeh crémeux

En guise de conclusion, cette fiche recette résume en cinq points les conditions optimales pour obtenir un beau bokeh :

  • choisissez un sujet placé dans un environnement contrasté (teintes ou luminosité)
  • éloignez-le autant que possible des premiers et arrière-plans : par exemple en macro, évitez la présence d’herbes folles trop proches de lui, dont la forme linéaire risque de casser le bokeh
  • utilisez une focale aussi longue que possible en fonction du contexte et du cadrage attendus : rappelez-vous bien qu’à cadrage identique, utiliser une focale longue ne fait pas perdre de la profondeur de champ
  • approchez-vous de votre sujet
  • ouvrez le diaphragme en surveillant la profondeur de champ.

Conclusion

Les illustrations de cet article laissent à penser que la recherche du bokeh optimal ne concerne que les macroteux. La recette est pourtant strictement la même, qu’on fasse du portrait, de la photographie d’objets, etc… mais mon stock d’images est tout simplement plus axé fleurettes.

A vous maintenant de nous montrer ce qu’il est possible de faire dans d’autres disciplines en postant vos images avec le tag #NikonPassion !

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About the Author

Jacques Croizer
Ce tutoriel photo vous est proposé par Jacques Croizer. Collaborateur régulier de Nikon Passion il est aussi l’auteur d’un guide qui simplifie la technique photo au profit du plaisir de photographier. Recevez votre KIT DE DÉMARRAGE PHOTO et UN CONSEIL QUOTIDIEN par mail pour progresser en 5 minutes par jour.

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24 Commentaires sur "Comment faire un bokeh : définition, principe et exemples"

  1. Un grand merci pour cet article très clair. Je découvre le bokeh pour ma part, et je compte bien l’essayer dès ce prochain week-end – si le temps le permet – avec mon Sigma macro 105 mm 1:2.8 à monture Nikon.

  2. Très bien expliqué , bravo et merci

  3. Article complet avec des explications claires, faciles à comprendre. Bravo!

  4. Félicitations .je n’avais jamais lu un aussi remarquable article traitant du Bokeh,clair,precis,riche d’enseignement.Bravo.

  5. un grand merci pour les conseils bien utile et même très utile nous sommes pas des pro de la photo assayions de nous amélioré et de progresser avec vos conseils bien cordialement alain desban

  6. Je ne connaissais pas l’effet Bokeh mais je m’amuses souvent à le faire maintenant je sais comment mieux le travailler merci

  7. Bonjour,
    Cet article est très bien fait. En plus de la photos animalières je pratique la « macro photographie, fleurs, papillons… avec comme objectif un 105 macro de chez sigma », et j’ai parfois des problèmes de fond, je pense qu’avec cet article je devrais pouvoir en solutionner plusieurs.
    Merci pour cet article et bravo pour les photos

  8. ravi de lire un article compréhensible et où on ne me tutoie pas!

  9. Les illustrations graphiques pour 6 et 12 lamelles comportent 5 ou 8 lamelles…curieux ! Sinon, bonne explication du rendu des flous…Bravo !

  10. Depuis que je suis un « Nikonpassion », j’enrichis ma bibliothèque de super articles et bouquins, grâce à vous, je me suis lancé dans la macro étant un amateur d’ enthomologie pour ma 1ere passion la pêche à la mouche.
    Merci à vous et continuez

  11. Bonjour,
    Je me rends compte qu’en avançant en photo macro, j’ai eu tendance à ouvrir de plus en plus le diaphragme, ce qui entraîne bien sûr des contrainte de plus en plus grandes pour avoir un sujet net ( perspective ).
    Mais je vois que je n’ai pas eu tord.
    Cet article est très clair, et très utile, merci !!!

  12. Merci comme à l’habitude votre article sur le bokeh est très intéressant ; Une fidèle de votre page Facebook . 😉

  13. Bonjour,
    Pour cet article très intéressant, la majorité des photos sont prises avec « bague ». De quoi s’agit-il ? Des multiplicateurs de focale ? Merci de votre réponse. Bien cordialement.

    • Ce sont des bagues allonge. Elles se présentent sous la forme d’un cylindre et s’intercalent entre le boitier et l’objectif afin d’en augmenter le grandissement. On perd la mise au point à l’infini, mais sur ce type de photos, ce n’est pas un problème.

  14. Excellent article, à la fois très clair et très précis!
    On en redemande.

  15. Article fort intéressant, clair net et précis. Facile à comprendre. Un article à saveur pédagogique… vous êtes une personne qui avez le sens de l’enseignement. Merci

    p.s. J’attend votre prochain article.

  16. Un superbe commentaire sur le Bokeh j’aime les explications claires. bien vu le partage . merci à Jacques Croizer et à toi l’ami photographe Jean Christophe de l’avoir publier. Bonne semaine. Marc

  17. Un article fort intéressant sur un sujet dont on parle souvent sans en bien connaître le fonctionnement. Un article sans aucun bokeh pour ce qui est de sa compréhension !Un grand merci !